jeudi 23 juillet 2015

Grépon-Mer de Glace 1-2-3/07/15



Le temps est au beau fixe, ça change de l'été dernier ! Et tous les projets en attente s'enchaînent, le repos est oublié et le projet du Grépon en tête depuis un moment se précise...


Hugues et Chinois sont dispo, on peut faire deux cordées! Mais le but à Bionassay hante Hugues qui veut absolument terminer cette course. Alors ce sera sans eux :( On réfléchit longuement, sachant que le départ en Corse pour Rom approche et que ce sera sûrement la dernière course en montagne. Mais on ne veut pas refaire cette approche interminable jusqu'aux Conscrits, et la chaleur actuelle donne plus envie de grimper du rocher que de batifoler dans la neige...


On prépare les sacs pour bivouaquer deux soirs (au pied et au sommet du Grépon), et installer la highline déjà ouverte au sommet. Malgré tous les efforts possibles, les sacs sont quand même bien lourds!
On prend le train du Montenvers à 16h avec 36 degrés et les grosses chaussures de glacier, un beau paradoxe!

Rapidement (ouf) on abandonne les wagons de touristes, descend les échelles pour prendre pied sur la mer de glace. Enfin là on dirait plutôt un désert de cailloux, ça fait flipper à quel point ça fond et le glacier recule, mais bon... On a quand même un peu de frais et c'est bien agréable. On arrive aux énormes flèches rouges et jaunes qui indiquent le refuge de l'Envers des aiguilles et on regrimpe aux échelles; Là, je me pose un peu des questions sur ma capacité à grimper 850m avec ce sac énorme sur le dos qui me tire en arrière... Mais je n'y pense pas trop, c'est angoissant, de toute façon je n'ai même pas regardé le topo et je suis mon namoureux...!


On trouve un beau bivouac sur une grande dalle dans un pierrier juste sous la face qu'on grimpera le lendemain: le pied! Vue sur l'Aiguille Verte, les Drus, la Mer de Glace, les Périades, les Grandes Jorasses... Magique :) Un bon repas pour vider un max de poids des sacs (mais pas trop pour manger quand même le lendemain!), petite séance de Yoga, et on s'installe confortablement pour regarder les montagnes rougir sous le soleil qui se couche lentement, laissant place à la lune bien ronde.


Réveil à 4h, petit dej rapide et on refait les sacs pour partir à 5h. On a fait le choix de ne pas partir de nuit, comme on dort au sommet, nous ne sommes pas trop pressés, et rapidement on éteint les frontales.
On monte sur le glacier, passe la rimaye bien raide mais facilement franchissable, et on arrive au départ de la voie. Un grand pas pour passer de la neige au rocher et c'est parti!


De la grimpe facile et agréable, un cheminement évident et les premiers rayons de soleil apparaissent... Qu'il est bon d'être là! On se retrouve souvent sur de bonnes vires et on avance bien, c'est magnifique. On s'élève lentement, et le sommet semble se rapprocher bien lentement aussi :)

L'itinéraire se corse un peu, on est censés faire un rappel au sommet d'un éperon, mais apparemment nous sommes déjà plus haut que ce que le topo indique. Mais pas les premiers! De nombreuses sangles sur un bloc témoigne que d'autres cordées ont emprunté ce rappel, et la suite semble facile pour retrouver la voie.

Nous avons chacun une bouteille d'un litre et trouvons de temps en temps un ruisseau pour la remplir et se réhydrater, mais j'avoue que même après avoir bu jusqu'à plus soif, j'ai la sensation d'être déshydratée... Mais encore une fois je n'y pense pas trop, je contemple, j'apprécie d'être là, j'assure, parfois je ferme les yeux et m'assoupis en restant concentrée sur la corde que je tiens dans les mains et dont je suis la tension. Lorsqu'il me reste 10 mètres de mou, j'enlève le système d'assurage, me prépare et suis Romain en corde tendue.


De temps en temps on regarde le topo. Une fois Rom me dit que ça fait un moment qu'il ne suit plus trop le topo mais son instinct... Et ça grimpe de plus en plus. Rom passe devant une sangle de réchap et arrive à un col infranchissable: "Arrête de monter, je fais un rappel ce n'est pas là". On redescend jusqu'à une vire et on part vers une fissure qui a l'air sympa. Une longueur magnifique mais la difficulté est maintenant un cran au-dessus.
Avec les centaines de mètres déjà grimpés, et le fait de savoir que nous ne sommes pas dans la voie qui me tend un peu, je commence à bien sentir la fatigue.


J'ai besoin de faire une pause, manger une pâte d'amande, souffler sans être concentré dans l'action 5 minutes... Les longueurs dans lesquelles nous progressons sont plus soutenues que le 3 ou 4 prévu dans le topo et j'y laisse pas mal d'énergie avec mon sac de 10 kilos.

Rom est une vraie machine, pas une seconde à perdre, il avance toujours, en cherchant l'itinéraire, sur-motivé, excité par cette ascension. J'ai l'impression qu'il n'a jamais faim, soif ou peur, toujours la patate, le sourire, la petite blague, et la même devise du début à la fin: "On a jamais été aussi proche du sommet!". Son énergie débordante me fait tenir et avancer.

Au bout d'un bon moment, et maintenant qu'on a pris beaucoup de hauteur, on retrouve la voie. Une grande vire horizontale nous amène en face de l'Aiguille du Roc, vertigineuse et majestueuse. Il nous reste environ 100 mètres à grimper. Physiquement, je suis fracassée. J'ai les épaules broyées par le sac, les abdos déjà courbaturés par le poids que j'ai sur le dos et qui me tire en arrière. J'ai la peau des mains poncée par le rocher abrasif et ça commence à pas être très agréable. Je supporte plus trop les chaussons non plus. Et le sommet est tout proche. Mes doutes sur ma capacité à atteindre le sommet s'estompent quelque peu et j'ai comme un soulagement intérieur. Paradoxalement, je sais que les deux longueurs les plus dures sont les dernières. Mais c'est beau tout autour et j'apprécie mon ventre qui se dénoue, la tension qui s'atténue.


"Plus qu'une cheminée en 4 et deux longueurs en 5 sup!". Trop cool, j'aime bien les cheminées, en 4 je reprends confiance, avant de tout donner pour les deux dernières et arriver au summit!
Oui mais: la cheminée avec un sac énorme c'est pas évident! t'as envie de rentrer dedans mais ce truc dans le dos s'accroche partout et du coup la technique classique devient impossible à utiliser... Ce sera le 4 le plus dur de toute ma vie. Craquage physique, je suis au bout de mes forces... Et psychologique, des larmes coulent sur mes joues. Je suis là à trois longueurs du sommet, moins de 100 mètres sur 850 alors je ne peux qu'avancer. Le vide, le gaz, est maintenant bien là et ma peur aussi. Rom me prend sec autant qu'il peut pour m'aider. Je suis plus qu'épuisée.

Les deux dernières longueurs seront un calvaire psychologique. Je n'ai jamais ressenti un tel épuisement nerveux. Finalement en terme de difficultés pures, elles n'étaient pas homogènes sur la longueur, mais marquées par des pas de bloc, que j'ai pu passer en tirant sur des sangles, et avec l'aide de Rom qui me hissait.


Le sommet! La vierge du Grépon, le coucher de soleil à l'horizon alors que toute la vallée est dans l'ombre depuis longtemps, la pleine lune qui se lève sur les Grandes Jorasses, 1000 mètres à droite, 600 à gauche...


Des larmes coulent encore... Le spectacle est juste incroyable, dans un silence apaisant. La sensation d'être seuls au sommet. A l'intérieur de moi-même c'est un mélange étrange. Une fatigue intense générale, de la joie, du bonheur, et cette peur du vide qui me broie les intestins. Je suis assise sur cette dalle suspendue, mon sac toujours sur le dos mais qui me sert maintenant de dossier, les jambes coupées en regardant Romain se détacher et se promener d'un côté à l'autre du sommet, pour se prendre en photo avec la vierge et préparer le prochain rappel. Il est 2Oh.


On rejoint la vire de la bicyclette qui sera notre bivouac. Rom installe une main courante, va chercher de la neige dans une fissure pour faire de l'eau, je suis inutile, j'ai besoin de dormir et me remettre de mes émotions. Je pourrais même m'endormir sans manger. Mais une fois encore l'énergie de Romain me fait tenir. On se prépare un petit repas bien mérité sous la pleine lune, plusieurs tisanes pour se réhydrater, avant de se glisser dans les duvets à minuit.


Réveil à 5h aux premières lueurs du jour. Un spectacle grandiose. Une fatigue toujours bien là, mais Romain est de nouveau d'attaque: on a une highline à installer!
Petit dej et il est parti: il grimpe au dessus de la vire pour atteindre un des deux ancrages, installe un côté de la highline et redescend, pendant que je fais fondre de la neige pour que l'on ait un peu d'eau.
"C'est tout bon, on va de l'autre côté, tu m'assures, j'installe et on est bons". Je le suis. Pour aller de l'autre côté ça me remet vite dans le bain: un beau pas où on passe au-dessus de 800 mètres de vide en se tenant à une bonne prise puis en s'accrochant à un bloc pour atteindre l'autre côté, ça réveille!


Il grimpe sans trop savoir si ça passe puis finalement redescend: "ça ne passe pas par là il faudrait qu'on fasse un rappel ensemble pour passer sur la droite et que tu m'assures de plus bas".
Sauf que de là où je dois l'assurer, c'est à l'ombre et il fait super froid! "Je vais chercher une veste et je reviens". Je suis totalement consciente de ma lenteur à cause de ma peur du vide alors je me concentre et donne tout pour être le plus efficace et rapide possible. Je dois repasser deux fois ce pas au dessus du vide. J'ai eu l'impression d'aller vite mais quand je reviens Rom me dit "Bon on va arrêter là, chaque geste pour toi ici prend beaucoup trop de temps et l'heure avance, on est même pas sûrs que ça passe à droite, il faut encore installer, slacker, désinstaller, re-grimper et faire le rappel pour gagner la brèche et commencer tout l'itinéraire de descente. Il est déjà 8h. Il faut savoir parfois renoncer". J'approuve de suite, bien consciente de mes possibilités et mon état d'épuisement total. Soulagée même.

On range le bivouac, la slack et on grimpe. Une longueur aura suffit à me rappeler l'état de fatigue dans lequel je suis, et il était temps de descendre.
Depuis la brèche, le glacier a l'air tout proche et les premiers rappels rassurants. Il n'en sera rien. Après trois petits rappels, on se retrouve sur un troisième plein gaz, qui passe sur un bloc coincé, ambiance!

On descend un couloir de neige bien raide mais qui à l'air en bonne conditions. En fait, je me retrouve parfois à faire partir 40cm de neige revenue sur de la glace vive. Tout de suite moins évident! J'essaie de tasser la neige à chaque pas mais ça avance moins vite que j'imaginais.

On rejoint le glacier et la neige est en meilleures conditions heureusement. On descend un premier couloir avant d'arriver dans la traversée exposée. La veille depuis le sommet on a entendu et vu bien trois éboulement de glace et rochers. Le glacier des Nantillons est connu pour ça, et vue la canicule actuelle ça n'arrange rien... Je n'ai que ça en tête et m'arrête pour qu'on se mette d'accord "Si on entend un bruit on court de quel côté?" "En avant" "Ok".

On suit la trace qui est bien marquée, on passe entre des crevasses et au-dessus de nous ce sont des immeubles de glaces qui nous dominent. Ma fatigue générale je l'ai oubliée, et j'avance à un rythme soutenu. Soudain j'entends un bruit sourd de craquement. Je me retourne et vois un bloc de glace gros comme une voiture qui tombe du glacier mais derrière nous. Je pense immédiatement que nous ne sommes pas dans son axe, mais quand il rebondit dans la neige, il roule et commence à se diriger vers nous: "Allez Rom on avance!". Rapidement il poursuit sa course mais n'est plus dans notre direction... Il passe sur nos traces, à 100 mètres de nous. Ca c'est joué à 1 minute... Mais nous sommes toujours exposés alors il faut vite avancer pour se mettre à l'abri . On arrive sur un rognon rocheux à l'abri des éboulements, d'où partent une série de rappels. "On a eu chaud, mais ce n'est pas fini".

                                    L'itinéraire de descente sous les yeux de la vierge de Grépon

Après six rappels, il faut de nouveau traverser sous une zone exposée. Et là, c'est environ un rocher qui tombe toutes les 5 minutes. Je choisis de ne pas traverser et d'aller droit dans le pierrier pour traverser plus bas. Rom suit les traces. A peine 2 minutes plus tard, de nouveau un gros bruit et c'est un rocher qui arrive droit en direction de Rom. Il se met à courir et le rocher passe à 20m de lui. Il ne faut vraiment pas traîner ici. Je vais droit sur le pierrier mais quand j'arrive dessus surprise: les rochers sont posés sur de la glace vive et à chaque pas je provoque un éboulement de rocher qui s'entraînent les uns aux autres; l'enfer: je dois remonter pour prendre cette traversée exposée, je cours, et rejoins Rom.
Encore une belle frayeur! Mais c'est fini, nous sommes sains et saufs sur le début d'un sentier de randonnée pédestre... La pression tombe.

On part en direction du Plan de l'Aiguille. Petite pause dans un ruisseau, on boit, mange un gâteau, met les pieds dans l'eau, et on savoure l'instant... Quelle belle aventure.

Rom rejoint la benne du Plan de l'Aiguille comme il a le forfait saison, et moi, je descends les 1000m de dénivelés à pieds jusqu'à Chamonix pour méditer, laisser la pression retomber doucement, récupérer et finir ce voyage en douceur.

Un projet un peu trop ambitieux que d'installer cette highline au sommet du Grépon, juste tous les deux avec des gros sacs, pour ma première expérience de montagne. On apprendra ensuite que la grimpe du deuxième ancrage que nous n'avions pas installé, est bien difficile en arrivant par l'itinéraire de la Mer de Glace. Les ouvreurs et répétiteurs de cette ligne avaient en effet accédé par l'autre côté (Chamonix).
Aucun regret dans tous les cas, juste l'envie de travailler sur moi, sur ma peur du vide, de retourner en montagne, d'apprendre encore, et d'aller un jour installer cette ligne, ou d'autres ;)

Tentative de la traversée Miages-Bionnassay-Mont-Blanc

Bien motivés par la traversée des arrêtes du Pourri on reprend les mêmes cordées et on est chauds pour cette belle et longue course.



Partis pour trois jours, en altitude, avec pas mal de dénivelé, on prévoit de dormir aux refuges des Conscrit le premier jour et de Durier le 2ème, même si c'est un budget, pour une fois on privilégie le poids des sacs...



Rdv aux Contamines, notre ami guide Baroon's souffre d'une rage de dent et ne pourra nous suivre.
On part à trois dans l'après-midi pour la première étape de marche jusqu'au refuge des Conscrits.



Une ballade interminable dont j'ai souvenir et qui est toujours bien longue, même avec des sacs plus légers. Le temps n'est pas au beau fixe et on a pas l'occasion d'apprécier le paysage cette fois-ci.
Environ 4-5 heures de marche avant d'arriver et Romain est tristement surpris: le refuge ressemble plus à un hôtel, la capacité est énorme, il est tout moderne, sans charme... La montagne moderne.
Même s'il est loin d'être rempli, on est pas fans d'^tre avec trop de monde, ça casse un peu l'ambiance de partir à l'aventure, mais c'est un peu normal au pied d'un itinéraire classique et accessible.



Départ à 4h30 pour monter à l'aiguille de la Bérangère sous les lueurs magnifiques du lever du jour...
Le paysage est à couper le souffle tout le long des la traversée des dômes de Miage.




C'est de la marche sans difficulté technique, mais sans encordement il faut rester bien vigilant car à certains endroits, il ne faut pas dévisser.




On crapahute sur le dernier ressaut, tire un rappel avant de rejoindre le refuge Durier à 10h30.
On était trois cordées sur l'itinéraire, progressant globalement au même rythme alors c'est bien sympa d'arriver ensemble dans ce refuge perché et isolé.



Manon la gardienne nous accueille, on étend nos affaires au soleil, petit casse-croûte et on passe dans le brouillard...

Le refuge Durier est mythique et sa gardienne tout autant: perché au pied de l'aiguille de Bionassay, ne désservant qu'une course et donc peu fréquenté, à 6h d'approche de la civilisation...



L'attente jusqu'au repas du soir sera dans la bonne humeur dans ce petit refuge convivial, entre partie de coinche et sieste. Un repas excellent et la mauvais enouvelle tombe avant le dessert: Manon appelle le centre météo qui annonce du vent et des précipitations dans la nuit... Aïe...

On se couche pleins de questionnements et le réveil est quand même prévu à 2h. Un premier sort, et revient dubitatif. Je vais aux toilettes sous la neige qui tombe à l'horizontal et j'ai peine à respirer... Ça pue un peu... Hugues sort et n'y croit pas, les autres cordées non plus... Rom sort et revient toujours motivé: mais non ça fait! Mmmmmm La trace bien faite la veille n'est plus visible, avec la frontale dans ces conditions on ne voit pas grand chose, c'est la tempête. Et si c'est comme ça une heure ça passe, mais si c'est tout du long c'est pas la peine: sur l'arrête effilée avec ce vent ce serait dangereux, on ne verra rien du paysage, et marcher 12h dans la tempête ce n'est plus vraiment du plaisir. Contre l'avis de Rom qui est déçu mais à l'unanimité on se rendort une heure et on avise.



A 3h les conditions sont identiques, à 4 puis 5h aussi... C'est la loose. Mais c'est la montagne, les conditions changent vite et il faut savoir renoncer...

On attend que le temps se lève pour attaquer la descente mais il n'en sera rien. On part dans le brouillard givrant qui nous trempe en 5 minutes.



Le départ de la descente est impressionnant: à 30m du refuge, Hugues commence à descendre dans la pente, dans du terrain bien pourri, de la neige humide posé sur des cailloux instables: le top! Et c'est bien raide avec chute interdite pendant un bon moment. Après les 30 premiers mètres encordés, on poursuit cette longue descente chacun à son rythme, toujours sous un ciel bien gris agrémenté de gouttes de pluie. On prend pied et traverse le glacier en bas de la pente, puis continuons un chemin bien long jusqu'au fond de vallée. En bas, il fait grand soleil, mais les sommets restent bien bouchées... Ce n'était pas pour cette fois :)

Une belle première journée et de chouettes rencontres, pour un séjour en montagne toujours magique et pleins d'imprévus !


mardi 21 juillet 2015

La reprise de la slackline

La magie des saisons qui défilent me met parfois face à bien des épreuves...

Remonter sur une highline après six mois les pieds au sol n'est pas toujours simple. L'année passée, mon appréhension du vide et du matériel s'était amplifiée, bien plus que les deux années passées. Cela avait pris toute la saison pour regagner confiance, retrouver de bonnes sensations, et dans la tête, les doutes et remises en question ne sont pas de tout repos. Un coup dur qui m'aura finalement fait faire un grand pas en avant dans la connaissance de soi. Je m'y suis intéressée de plus en plus, et ai commencé un nouveau et long chemin, celui du développement personnel, à travers le yoga, le qi qong et la méditation...

                                               Mimi la machine sur la King Line dans la Jonte

Ce printemps, toujours triste de ranger les skis et à la fois impatiente de remonter sur la ligne, les sensations étaient toutes autres. Du plaisir principalement; le bonheur d'être là en lévitation, avec l'adrénaline qui titille le corps et l'esprit, sans objectif, sans pression.

Mais le Verdon pour commencer c'est un peu hard: la 35m passe quand même avec moins de stress que l'année passée, mais la 60m installée en T18 en mode new school (tension à la main) remet les choses à leur place. Pas de précipitation, avant de se mettre sur un projet comme ça il va déjà falloir apprendre à slacker mou :)


Un petit tour à l'Ardèche Slackline Meeting, auquel on aura plus participé dans l'orga qu'en tant que participant, nous remet vite dans le bain et on retrouve pleins de copains. L'ambiance dans la slack est quand même unique: je n'ai jamais rencontré autant des gens ouverts, différents, simples et motivés que dans ce milieu. Et on ne cesse de faire de nouvelles rencontres.

De retour en Savoie, Rom fan de waterline, me convertit aux joies de l'eau. J'arrive enfin à catcher (me rattraper à la ligne quand je tombe) et ce changement me fera faire un bond en avant dans ma progression. Je passe plusieurs fois 70m de water avec de la core et T18 (des sangles lourdes ou élastiques), et développe une nouvelle technique pour m'isoler des bruits alentours. En effet, j'ai l'habitude de faire de la highline avec de la musique pour éviter les distractions des gens qui parlent, mais en water ce n'est pas possible. Alors pour ne pas entendre les gens au bord de l'eau qui regardent, parlent de moi, ou les enfants qui disent en répétant "tombe" parce que c'est quand même plus marrant ;) je me répète à voix haute "Calme", "Solide". Le début d'une légende ;)

                                                        Rom sur la water de Macôt

On part installer la 60m de la Chambotte qui me tenait à coeur et je flash l'aller en me répétant toujours à voix haute "Calme, Solide!". Cette technique m'aide à me recentrer, me concentrer et me motive, mais elle est vraiment trop bruyante et pas agréable pour l'entourage j'imagine...

Mon nouveau record personnel: 60m à la Chambotte




Nouvellement fan de water, je fais le bonheur de Rom en acceptant d'aller au festislack, un festival de waterline organisé cette année par Laure et Faleg à Indiana river chez Robin, juste à côté de Montpel. Rom passera plus de temps au-dessus de l'eau que du sol, et moi je n'aurai jamais fait autant de water ! Ma nouvelle devise fait bien marrer tout le monde en tout cas ;)

                                              Bibisch sur la paradise trop easy...

Un petit stop par la Paradise (que je valide dans les deux sens!) avant de nous rendre aux Natural Games pour profiter deux jours de la Jonte et retourner sur des lignes mythiques comme l'inesperée, qui auront fait entendre à tous ceux encore non avertis, mon mantra préféré :) C'est décidé, je dois travailler pour réintérioriser cette technique pour le bien de la communauté ou je vais finir par slacker toute seule ;)

                                                                     Rom sur la king

De retour en Savoie, on profite des 40ans de Babar au refuge du Ruitor, pour aller ouvrir la 100 mètres sur le lac du petit sur ancrages naturels, qu'on avait déjà en projet un an auparavant. Il y a encore de la neige sur les rives du lac et l'eau est vraiment gelée. Je mets un leash pour être sûre de ne pas finir dans l'eau au milieu du lac. Même avec le leash, l'eau si froide donne l'impression d'être en solo... J'avance, je catch, je repare, j'ai des pures sensations. Mais deux catchs au milieu me saisissent rapidement. Je ne sens plus mes pieds, et même si ça ne dure qu'une demi seconde, le passage dans l'eau me tétanise. J'avance pour sortir de cette zone puis finis de traverser en marchant. Rom traverse aisément mais non sans pression.



Une autre water alpine nous appelle depuis un moment au lac du Retour, dans la vallée voisine. 2 heures de marche avec des gros sacs, nous n'avons toujours pas beaucoup de collègues motivés pour nous suivre dans nos aventures... On décide de mettre les ancrages (obligé de mettre des spits) à 7-8 mètres au-dessus de l'eau, pour pouvoir être au sec tout du long. Antoine Mesnage nous rejoint et participe à l'installation, et David Marie, un nouveau futur passionnée de slackline Borain vient faire des photos.



On la laisse installée deux jours, les deux derniers de Rom avant de partir en Corse faire la saison de Canyoning. Un cadre splendide, une ligne mythique surplombant la vallée, faisable en midline avec un leash ou en water avec une belle flèche, le rêve...





La waterline j'ai eu le déclic et suis addicte, un bon point !
Reste à se mettre à slacker mou... Let's est en manque de highline et me contacte pour aller installer une ligne à Cham sur l'Aiguillette d'Argentière! Parfait, ça sera sûrement la bonne école ;)
Je rejoins une fine équipe de gonzesses Suisses et on se charge pour une heure d'approche. L'install correspond moyen à la description de database légèrement sommaire, et les points de l'Aiguillette qui sont ceux de l'escalade tirent un peu la gueule... Bof, mais on fait l'install, de toute façon on mettra pas de tension ;)

                                                              Lets prend la pose ;)

Chose promise chose due ! Audrey et Zoé, qui sont plus novices dans l'activité, feront de belles preuves de motivation en allant s’asseoir et faire des levers, Lets fera l'aller-retour sans trop de problème et moi je mettrai trois allers à catcher avant de traverser sur cette ligne bien molle de 45 mètres. J'ai découvert des sensations complètement nouvelles et n'avais jamais ressenti autant de calme intérieur en highline...
Une bien belle journée entre filles au milieu des chamois, pour une nouvelle révélation !


Encore plus motivée que jamais pour slacker encore et encore... 
L'apprentissage est illimitée, les sensations incroyables, les spots magiques et les pratiquants tous plus extraordinaires les uns que les autres!

La traversée intégrale des arrêtes du Mont-Pourri

Une course qui me fait rêver depuis longtemps, longue, sauvage et qui domine ma région natale.

On part à deux cordée, Hugues et Baroon's, et Rom et moi-même.



On monte au refuge du Turia depuis la Gurraz en 1h30 dans l'après-midi alors que les orages sont annoncés. A l'arrivée, surprise: le refuge est gardé; mieux que ça le gardien est en pleine installation (enfin sieste), mais on a même pas la place de se poser à l'intérieur et il commence à pleuvoir... Bien dommage! Nous qui pensions être tranquilles dans ce beau petit refuge, c'est raté! Et l'accueil est loin d'être sympathique: on lui propose de l'aide pour ranger afin que ça aille plus vite et qu'on puisse s'installer, mais il refuse et mettra plusieurs heures avant de nous faire une place...

On écourte la soirée pour un départ prévu à 4h...




Les premières lueurs du jour ne se font pas attendre et rapidement les frontales sont inutiles.
Le soleil arrive pendant notre traversée sur le glacier et les lumières sont splendides... On marche au milieu des séracs, crevasses, passe la rimaye pour atteindre la brèche Puiseux qui marquera le début de notre traversée d'arrête.




Le rocher est délicat, de moins en moins en prenant de l'altitude mais il faut être attentif. Les nuages vont et viennent tout au long de l'ascension jusqu'au sommet, mais nous gâcheront la vue depuis le point culminant du Pourri.




La pause au sommet s'écourte car ce n'est pas fini, on poursuit sur l'arrête Nord, qui s'effile et devient très aérienne, dans du rocher toujours délicat.



La progression est lente dans ce genre de terrain même si ce n'est pas difficile techniquement, car il faut sans cesse passer des ressauts, re-grimper, redescendre... Remettre les crampons, enlever les crampons. Mais les nuages sont partis, et malgré la fatigue qui se fait sentir, le spectacle est grandiose.



Arrivés au bout de l'arrête en rocher au sommet du Mont turia, on remet les crampons pour rejoindre le glacier du grand col et l'itinéraire du col des Roches.

On rejoint le refuge du Turia par le couloir du Grand col et une longue traversée dans les pierriers pour arriver à 16h. Soit 12h de course, 1200m de dénivelés depuis le refuge et 1000 de plus depuis le bas...

Epuisant mais surtout magique, un souvenir inoubliable de montagne à la maison !